Le croustillant marché de la biscotte
Par Suzanne Boireau-Tartarat
Après dix ans passés dans diverses productions du Sud-Ouest, le jeune cadre de l’agroalimentaire a réalisé son rêve de devenir chef d’entreprise. Le bon produit, au bon moment : Sylvain Boucher a craqué pour la dernière biscotterie artisanale de France, en quête de repreneur. À partir de la recette d’origine, il a développé la gamme de La Chantéracoise. Résultat : la boutique d’atelier, perdue dans la forêt de la Double, ne désemplit pas et le réseau de distribution s’étire partout en France.
L’aventure commence dans les années 1950 quand un boulanger venu de Périgueux s’installe dans le fournil de Saint-Germain-du-Salembre et se spécialise dans la fabrication de biscottes, qui remportent un beau succès local. C’est au moment de prendre sa retraite, en 2005, que Jean-Pierre Pommier rencontre Sylvain Boucher, cadre expérimenté du secteur agroalimentaire alors âgé de 32 ans.
« Ma formation et mon cœur de métier, c’est la production. Dans la fromagerie, la biscuiterie, la laiterie, les boissons… En m’ouvrant à la relation clientèle, dans une entreprise de spiritueux, l’idée a germé de reprendre une entreprise pour conjuguer mon savoir-faire au plaisir des échanges commerciaux. »
Il s’était fixé trois critères de choix : une structure à taille humaine, des produits de qualité, dans le grand Sud-Ouest. Sylvain Boucher croit au potentiel de ces madeleines de Proust qui font remonter des souvenirs d’enfance et reprend l’affaire avec un certain sens du défi. Car si l’on comptait encore 300 biscotteries en France en 1970, la grande distribution a concentré ou éliminé les opérateurs au point qu’il ne reste que six fabricants, dont cinq industriels bien connus. La Chanteracoise, dernière unité artisanale, est sauvée, affichant une progression de 20 à 30% par an.
Héritier d’un authentique savoir-faire
Sylvain Boucher s’est d’abord attaché à acquérir le savoir-faire de son prédécesseur, puis il a déménagé et investi dans un appareillage moderne, trouvé de nouveaux clients et orienté la distribution au-delà des boulangeries, vers les épiceries fines, magasins de terroir et bios, en diversifiant la gamme. Déjà à l’étroit, il a opté en 2011 pour la construction d’un atelier lumineux, fidèle au cadre rural de Saint-Germain-du-Salembre, petite commune de la Double. La boutique offre une large vue sur l’espace de travail et les clients qui le souhaitent peuvent même visiter.
« Les consommateurs souhaitent connaître la réalité du produit. On n’a rien à cacher, tout à partager. Les enfants posent des questions sur la fabrication, les adultes plutôt sur l’origine des matières premières. La qualité et l’origine, ça va ensemble. La génération élevée aux achats en grande surface veut aller vers autre chose, mettre quelques centimes de plus pour se faire plaisir.»
La dynamique du « Consommons moins, consommons mieux » est en marche, avec une priorité à l’accueil. La Chantéracoise reçoit les cars de touristes sur des circuits conçus avec l’Office de tourisme. 16 500 visiteurs ont ainsi été guidés dans l’atelier en 2014. Le point de vente, qui valorise aussi d’autres produits du terroir, est en plein essor et réalise à lui seul 12% du chiffre d’affaires.
Rester sur un marché de proximité
Sur les 30 références de La Chanteracoise, 30% sont certifiées bio. « Nous n’utilisons ni colorant, ni conservateur, ni OGM, ni huile de palme. Nous nous fournissons en France et si possible localement, avec 80 farines provenant d’un rayon de 25 km. » En plus de la recette originale, l’équipe a mis au point d’autres gourmandises.
« Notre petit jeu, sur la dernière fabrication du vendredi, était de lancer une idée et d’essayer. Ainsi sont nées les biscottes aux fruits ou aux pépites de chocolat, les briochées, les chocolat-orange, les multicéréales. »
Le ratage le plus mémorable reste la noix de coco. « En fait, une fois grillée, elle prend une amertume très désagréable : on comprend pourquoi ça n’existe pas ! » Cet été, l’entreprise a mis en place un jeu pour créer la biscotte rêvée du petit déjeuner. Deux bonnes idées sont arrivées en tête. « Pour l’une, on l’avait eue et on se demandait si cela plairait, pour l’autre c’est assez inédit. Le client a toujours raison ! » En 2008, l’entreprise a obtenu un prix de l’innovation pour ses toasts, qui représentent maintenant 15% de l’activité et sont déclinés avec plusieurs goûts.
De six salariés, la biscotterie a porté ses effectifs à dix-huit : moyenne d’âge 31 ans, tous installés dans les environs. L’unité est déjà à l’étroit. Sera-t-elle victime de son succès et de l’augmentation du volume en basculant vers le monde industriel ? La question taraude Sylvain Boucher, qui revient aux fondamentaux.
« Qu’est-ce qu’un produit artisanal ? Des ingrédients et matières premières, bien sûr. Mais aussi un travail manuel. Nous avons fait ce choix pour la mise sur grill, le conditionnement et, au final, la différence est réelle. Avec des volumes moins importants qu’avec une machine, mais une qualité intacte. Dernier critère : nous refusons le circuit de la grande distribution. »
Les résultats sont au rendez-vous. « L’entreprise progresse et tout le monde s’y retrouve car les salariés sont intéressés aux résultats. Ensemble, on travaille, on gagne et on partage. »
Biscotterie La Chanteracoise
Le Pont
24190 Saint-Germain-du-Salembre
Tél. : 05 53 80 51 17
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La ChanteracoiseProducteur de biscottes
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